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Une air de changement

Lundi 7 octobre 2024

19h45

Mes valises sont posées dans l’entrée. Le soleil commence à décliner et l’obscurité se fait plus présente. Mon appartement me paraît bien morne. Le silence règne et je me sens d’un coup très seule. Je suis restée une semaine de plus chez Patricia car je n’avais pas le courage de rentrer et aussi, faut se l’avouer, parce que je m’y suis prise trop tard pour prendre un billet de train. Maintenant, Patricia n’est plus là et l’été semble bel et bien finis. Je me rapproche de mes plantes, inquiète que la chaleur de l’été ait pu atteindre leur bien-être. Pourtant, la fraîcheur règne. Ma mère a assuré des allers et retours réguliers pour que mon logement reste le plus accueillant possible. Un échec! Cet appartement me rappelle bien trop de souvenir. Les souvenirs de Damien imprègne chaque meuble et les images de mes relations infructueuses habillent les murs. Je suis restée trop longtemps dans le jus de cette relation et cette vérité me frappe désormais. J’errais dans l’appartement sans vraiment m’émanciper de cette attache.

Drrriinnnnnngggg

Sortie de ma torpeur, je cherche des yeux mon sacs afin de trouver mon téléphone.

« Allo? »

« Coucou ma chérie! Tu es bien rentrée? » me demande ma mère.

« Oui. Je suis justement à l’appartement. »

« Ça a du te manquer d’être chez toi? »

« Pas vraiment maman. Cette appartement est trop lourd de trop de choses. Je me demande si je ne vais pas déménager. » L'idée m'effleure soudainement.

« Mais tu es au chômage, c’est pas très prudent » me répond-elle inquiète.

Une petite voix interne me dit qu’en effet, elle n’a pas tord pourtant je suis là, regardant mon appartement, le lieux de vie où je devrais me sentir chez moi mais rien ne vient ; ni soulagement d’être rentrée, ni envie de me poser sur le canapé, rien. Ah si ! L’envie de faire demi-tour.

« Maman j’ai besoin de changer. Je ne me sens plus à ma place ici. » lui dis-je alors, sa désapprobation m'ayant finalement totalement convaincue que ce projet ne tarderait pas à voir le jour.

« Tu peux pas attendre un peu ? » Ma mère, insistante, s'agitte derrière le combiné. Je l'entends aux tapotements de ses doigts sur le rebord en chêne du buffet où est posé son téléphone fixe.

J'inspire alors afin de retrouver mon calme, prend un profonde respiration et tente de lui répondre, la plus rassurante possible.

« Écoute je vais voir, rien ne m’empêche de regarder… »

De toute façon, je ferais bien ce que je veux.

 

16 octobre 2024

Malgré les réticences maternelles, le lendemain de mon retour, ma lettre pour signifier mon départ de l’appartement que Damien et moi nous occupions était postée. De son côté, ma mère, inquiète de mon projet de déménagement avait mobilisé ses connaissances - nombreuses - pour me trouver un emploi. Elle a été tellement efficace qu’elle m’appelait deux jours après mon arrivée pour m’informer qu’elle m’avait dégoté un entretien d’embauche. Une boîte de fourniture de bureau et de papeterie recherchait une secrétaire pour le chef du service commercial. J’ai eu beau lui dire que je n’avais pas d’expérience et que je ne saurais me vendre pour un poste que je ne connaissais pas, elle était déterminée. Ma mère dans toute sa splendeur ! Dés que l'inquiétude la saisissait, elle devenait aussi butée qu'une mule. Son visage se durcissait, son intention se tournait vers un seul objectif obsédant qu'elle arrivait toujours à atteindre. Je me demande quelle personne, elle a du harceler pour obtenir cet entretien ?

C’est ainsi que me voilà, assise sur une chaise, dans un couloir blanc qui semble sans fin. Obligée d’obéir à maman à 28 ans! J’ai soudain l’impression d’être une petite fille quin trop immature pour se débrouiller seule, a appelé à l’aide sa maman. La honte ! Ça va faire super pendant l'entretien !

Je jette un coup d’œil à mon portable : 10h15. Ils sont en retard, ce qui n’arrange rien à mon humeur massacrante.. Vraiment une idée de merde! Me voilà donc, le cœur battant -Dieu sait à quel point m’angoisser pour cet entretien sans intérêt m'agace fortement - assise dans ce grand couloir, en attente d’un moment qui s'annonce plus que gênant. Je tapote nerveusement du pied sur le sol lorsqu’un homme élégant et très charmant vient à ma rencontre. Cet individu d’un petit mètre soixante-dix, est brun, son regard noir et brillant transperce la paire de lunette ronde posée sur son nez. Il porte un costume de très bonne qualité qui lui sied à merveille et met en valeur sa présence. Il se dégage de lui une classe et une arrogance qui me font rougir immédiatement. Espérons que ce rougissement soit dissimulé par le fond de teint que j’ai appliqué sur mon visage avec l’infime conviction que cela m’aiderait. Si c’est lui mon futur chef, je ne répond de rien! Je m’emballe alors un peu plus pour ce travail qui, il y a deux minutes, promettait d’être d’un ennui mortel.

« Lola? » Sa voix grave raisonne dans le couloir désert.

« Oui c’est bien moi! » lui dis-je, me relevant rapidement et lui décochant le plus radieux de mes sourires. Allez ma cocotte, on met toutes les chances de notre côté. On en a besoin de ce job!

« Je suis M. ZICKIE. Veuillez me suivre. »

Monsieur ZICKIE se tourne alors et je ne peux m’empêcher de jeter un œil sur ses magnifiques fesses. Décidément ce costume lui va comme un gant. Il me dirige vers une grande salle où 3 autres personnes sont installées et me regardent impatientes. Une femme d’une certain âge, le regard vif m’invite à m’asseoir et commence l’entretien en me demandant de me présenter.

11h30

Je viens de sortir de la salle d'entretien et me dirige le pas léger vers la sortie. Finalement, cet entretien s’est plutôt bien passé. Je n’ai pas eu de réponse immédiatement mais je me suis montré plutôt convaincante. Mes expériences dans la télévente ont convaincu mes interlocuteurs que je pouvais tout faire.

« Un métier aussi difficile a du vous apprendre énormément de choses utiles? » m'a fait justement remarqué la femme qui précédemment me demandait de me présenter.

Par je ne sais quel miracle, j’ai pu répondre à cette question d’une manière si bien tournée que moi-même je m’étonnais à mesure que les paroles sortaient de ma bouche. Mais qui suis-je? Oohh moi, déesse de l’entretien d’embauche! En définitive, ce rendez-vous s’est révélé salvateur à une période où retrouver mon entrain me semblait bien difficile. De plus, j’ai appris que M. ZICKIE était LE chef à la recherche d’une secrétaire et autant être honnête, ma motivation est remontée immédiatement. Alors c'est le regard curieux que je parcours ce grand couloir blanc, jonché de bureaux d'un côté. Les locaux de l'entreprise Paper Purple se situe au cinquième étage d'une grande tour ronde située au coeur de ma ville. Les espaces de travail sont spacieux et de grande baie vitrée, avec vue plongeante, leur offre une luminosité très agréable. J'ai l'impression d'être à Wallstreet. Je m'imagine alors, locataire d'un de ces grands bureaux, riant avec M. ZICKIE, admirant ses jolies petites fesses retourner à leur bureau, répondant au téléphone d'une prestigieuse entreprise de papeterie haut de gamme. Ouh la calme toi Ginette ! Je fouille ma poche et en sort mon téléphone. J'appuie sur "Appel" et porte mon portable à l'oreille alors que je rentre dans l'ascenceur. Ma mère m'avait expréssement demandé de l'appeler dès l'entretien fini afin de faire le point sur ma situation carrément angoissante pour elle.

"Allo ma chérie ? T'en a mis du temps! Raconte-moi tout!"

 (© Ce texte est la propriété de "les Désirs de Lola" et ne peut être reproduit ou propagé sans autorisation sous peine de poursuite)